Plus un seul chant d'oiseaux, ni murmures de dryades.
Le soleil a dû céder la place à une nuit de cendres.
Plus un frôlement d'élytres, de grattements infimes...
Ma forêt est en deuil, défigurée et sale.
Quelques fumerolles se décident à mourir au pied de mes racines.
L'enfer termine d'épandre son charbon sur ma terre.
Certes, il enrichira le sol où nous survivrons peut-être ?
marqués par les flammes, dénudés de nos feuilles,
comme autant de squelettes exsangues et noircis.
Mais, en cet instant, la colère me redresse.
Mon coeur incendié ne cesse de saigner....
Je ne pleure pas sur moi, mais je hais ce silence.
Ma cime ne plie plus sous mes amis ailés,
je ne sens plus de présences parcourir mon écorce.
Où êtes-vous mes joyeux habitants d'écailles et de fourrure ?
Avez-vous réussi à regagner l'étang
où quelque ondine vous aura secourus ?
Ma solitude est telle, sous ce vent de chaleur
que mes plaies se déchirent, échappant peu à peu
des larmes de sève noire si pleines de détresse.
Autour de moi, nos arbrisseaux n'ont pas pu résister
à l'assaut du feu qui les a consumés.
Nos enfants sont partis et sans laisser de fruits...
Tout ce gâchis, ce mépris de la vie, à cause d'une main funeste ! !
Prenez garde, qu'un jour, lassé de vos actes et injures
le vieux peuple des bois n'enferme sa douleur
plus loin qu'il n'est possible, dans l'âme de sa souffrance
Imaginez alors notre refus de pousser,
de ne plus épurer l'air que vous respirez...
dans l'attente incertaine que votre espèce
gagne enfin en sagesse.
Réfléchissez, avant que ne tombe le glas,
comme s'effondre chaque jour un peu plus nos espoirs.
Ysi'Äd, chêne rescapé d'une forêt incendiée, m'a confié son désespoir, je vous le livre ici.
( Texte soumis à copyright : Isabelle C )